[1] voir aussi Pierre Barbancey dans l’Humanité le 20 mai :
Emprisonné par l’apartheid, poursuivi par Israël...
Alexandre Moumbaris est poursuivi pour « appel à la discrimination » parce qu’il défend la campagne de boycott d’Israël.
Alexandre Moumbaris n’aurait certainement jamais pensé se retrouver dans une telle situation ! Il est convoqué par le tribunal d’instance de Flers, dans l’Orne, le 24 mai prochain pour « appel public à la discrimination ». Diable ! Une telle qualification ne peut concerner qu’un raciste patenté. Un de ceux qui prônent l’expulsion des étrangers de France, qui refuse l’entrée de notre pays aux migrants. Eh bien, non !
Si Alexandre Moumbaris est poursuivi comme un dangereux délinquant c’est parce qu’il a osé publier, dans le numéro 140 du Bulletin d’information presse (BIP), le texte « Boycott désinvestissement sanctions (BDS) 2010 » reprenant, pour l’essentiel, la synthèse faite par la Campagne BDS France des succès des actions de boycott entreprises contre Israël dans le monde. Une campagne dont les grands médias ne parlent jamais mais qui, pourtant, se renforce. Une citation à comparaître pour un tel motif est déjà un scandale. Parce que cela signifierait que non seulement on n’a pas le droit de critiquer Israël mais qu’en plus toute tentative pour l’application du droit international par ce pays – c’est le but affiché de la campagne BDS – serait un délit.
Mais ceux qui ont saisi le tribunal de Flers savent-ils qui est Alexandre Moumbaris ? Il était membre du Parti communiste sud-africain (SACP) et membre de Umkhonto we Sizwe, la branche armée de l’ANC, créée par Nelson Mandela lui-même. En 1972, considéré comme un « terroriste » par le gouvernement d’apartheid, Moumbaris est arrêté et condamné à treize ans d’emprisonnement. En 1979, il parvient à s’échapper de la prison de haute sécurité de Pretoria où il purgeait sa peine. Une fois sorti d’Afrique du Sud, « Alex », c’est son surnom, reprend du service, revient en France et crée le premier bureau de l’ANC à Paris. Qu’Alex se retrouve dans le combat contre l’apartheid israélien est logique.
Il n’y a pas si longtemps, l’ancien président américain Jimmy Carter publiait un livre intitulé : Palestine, la paix pas l’apartheid. Venant de la part d’un homme à l’origine de la paix entre Israël et l’Égypte, l’interpellation était sérieuse. Tel-Aviv est inquiet de ces nouveaux développements. Le quotidien israélien Haaretz a révélé le 21 mars que le renseignement militaire israélien réunit des informations sur les organisations de gauche à l’étranger, que l’armée soupçonne de vouloir mettre en cause la légitimité d’Israël. Et en novembre dernier le Guardian de Londres affirmait que le ministre israélien des Affaires étrangères, l’homme d’extrême droite Avigdor Lieberman, demandait aux ambassades dans 10 pays européens de trouver environ 1 000 personnes qui agiront en « amis d’Israël ». Au fait, Bernard-Henri Levy, qui s’insurge contre la campagne BDS, va-t-il être poursuivi pour « appel à la discrimination » après son appel à boycotter la Corse ?
Pierre Barbancey
http://www.humanite.fr/19_05_2011-e...